Décrocher un crédit immobilier sera plus simple pour les investisseurs locatifs
Bercy et la Banque de France autorisent les banques à prêter plus aux propriétaires qui envisagent de louer leur logement.
Encore un coup pour rien? Après les annonces du gouvernement pour sortir le logement de la crise, jugées décevantes, celles des autorités financières pour desserrer le crédit immobilier, étaient aussi attendues. Bercy et la Banque de France ont autorisé, ce mardi, les banques à accorder plus de prêts aux investisseurs locatifs qui ne respectent pas les contraintes imposées aux banques (taux d’endettement maximal de 35% maximum et durée des prêts maximale de 25 ans).
Actuellement, ces dérogations ne doivent pas représenter plus de 20% des dossiers des banques. Parmi eux, les investisseurs pèsent 20%. Soit 4% du total. Bercy et la Banque de France vont faire passer cette proportion de 4% à 6%. Cette mesure entrera en vigueur «dans les prochains jours», une fois publiée au Journal officiel. «Nous souhaitons donner plus de marges de manœuvres aux banques pour mettre à disposition plus de logements sur le marché», explique une source proche du HCSF.
Selon les estimations du Trésor, cette mesure ainsi qu’une autre plus technique, pourraient se traduire par une augmentation de la capacité d’accès au crédit de 250 millions d’euros par mois. Bien loin des 12 milliards d’euros (hors renégociations) accordés actuellement par mois aux emprunteurs, tous profils confondus. «Une proposition de la profession consistait à permettre aux banques d’utiliser librement les 20% de dérogations possibles aux critères. Le HCSF a maintenu le cadre de répartition de ces dérogations, tout en augmentant, au sein de ces 20%, la part «libre d’utilisation» de 20 à 30%. Ceci va dans le sens d’un assouplissement», se satisfait la Fédération bancaire française.
Jusqu’à 15.000 dossiers en plus
Pour les courtiers, ce n’est pas cette mesure qui va relancer le marché de l’immobilier. «En partant sur la base d’un prêt moyen à 220.000 euros, nous parlons de 13.000 à 15.000 crédits supplémentaires pour les ménages. Une goutte d’eau», déplore Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux. «Nous regrettons que le HCSF n’ait pas jugé utile d’autoriser la prise en compte des revenus locatifs pour le calcul du taux d’endettement», réagit Olivier Lendrevie, président de Cafpi.
Reste à savoir ce qu’en penseront les banques, désireuses de ne pas rogner sur leurs marges. «Nous ne faisons pas beaucoup de prêts car nous ne gagnons pas assez d’argent sur le crédit immobilier», confie au Figaro le banquier d’un grand établissement national. Les banques empruntent actuellement à 3,5%, et prêtent aux particuliers quasiment au même taux. «La plupart des barèmes (taux de crédit avant négociation) affichent désormais des taux supérieurs à 3 % sur toutes les durées et l’on voit même de plus en plus de taux à 4 % ou plus sur 20 ans ou 25 ans», explique Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer, courtier en crédit immobilier. «Restriction dans les conditions d’accès au crédit et hausse des taux ont créé un cocktail explosif qui vient percuter de plein fouet le marché immobilier. Il faut réaliser qu’entre janvier 2022 et mai 2023, les emprunteurs ont vu leur capacité d’emprunt chuter de 20%, ce qui représente en moyenne une capacité d’achat en recul de 40. 000€, c’est considérable!», commente Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier.
Les banques ont le sort du marché immobilier entre leurs mains, estime le gouvernement. Mais pas que. Les vendeurs aussi. «Ils doivent accepter que les prix d’il y a 6 mois ne sont plus ceux d’aujourd’hui», explique Me Thierry Delesalle, notaire parisien. Car, certes, des taux de crédit à 4%, ce n’est pas nouveau en soi. C’était quasiment le cas en 2011-2012. Mais des taux de crédit élevés couplés à des prix de l’immobilier qui ne baissent pas assez, ça l’est. À cette époque, se loger ne coûtait pas aussi cher qu’aujourd’hui. Idem pour l’inflation qui était 2 à 3 fois moins forte, il y a plus de 10 ans. Un cocktail explosif inattendu qui explique pourquoi l’atterrissage du marché immobilier est plus brutal que prévu.